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Après la reconstruction en Europe, le SCI se développe et se diversifie

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Olivier Bertrand: Breaking down barriers 1945-1975, 30 years of voluntary service for peace with Service Civil International.
Paris (2008)

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Après la reconstruction en Europe, le SCI se développe et se diversifie

Jusqu’à la Deuxième Guerre mondiale et quelques années après, le SCI, en dépit de sa vocation internationale, est resté une organisation européenne. Les volontaires étaient presque tous européens, il n’y avait de branches qu’en Europe et le Secrétariat international était également européen. Ce n’est pas pour surprendre si l’on considère la position dominante de ce continent à l’époque. Il y a donc quelque justification à présenter dans un même chapitre les volontaires qui ont surtout participé à des chantiers dans l’Europe d’après guerre et ceux qui ont contribué à créer une structure internationale (ce sont souvent les mêmes).

Le développement des mouvements de chantiers, et en particulier celui du SCI, a souvent été affecté par le contexte international. Pendant la guerre, de manière assez surprenante, il y a eu un grand nombre de chantiers et le nombre de volontaires n’a pas beaucoup diminué1. Mais il s’agissait de chantiers très différents, qui n’avaient pas un caractère international et étaient inspirés par des idéologies opposées : dans certains cas, des chantiers organisés par des gouvernements de pays occupés se référaient à une idéologie nationaliste et parfois fascisante. A l’inverse, le Gouvernement britannique avait autorisé un assez grand nombre d’objecteurs de conscience à participer à des activités civiles utiles à la défense du pays. La branche britannique du SCI (intitulée IVS) était très impliquée.

Cette exception mise à part, du fait du conflit et des obstacles aux déplacements, les activités du SCI ont été réduites au minimum. Suivant les souvenirs de Ralph Hegnauer2 il ne restait pratiquement rien de l’ancien SCI à part quelques vieux militants en Suisse.

L’impact du contexte historique sur le SCI

Si l’on aborde donc l’après-guerre d’abord dans une perspective européenne (les autres continents font l’objet des chapitres suivants), on peut identifier cinq tendances qui ont eu des conséquences sur les mouvements de chantiers et donc sur le SCI. On ne mentionne ici que les évolutions historiques à caractère général, laissant de côté les évènements accidentels comme les désastres naturels.

Expansion, diversification internationalisation

Pendant la période qui nous intéresse et en relation avec l’évolution de ce contexte, le développement du SCI peut être résumé par quatre grandes tendances : l’expansion, l’organisation, la diversification des activités et l’internationalisation.

a) Pour répondre à des besoins urgents dans un domaine correspondant particulièrement à ses objectifs, le SCI a été amené à augmenter rapidement le nombre de ses chantiers et de ses volontaires, à créer de nouvelles branches et à travailler dans de nouveaux pays. Des actions d’urgence ont été entreprises dés 1944 en Palestine, en Egypte et en Grèce. En 1945, des chantiers de reconstruction et des actions d’urgence ont eu lieu en Allemagne, en France, en Italie et aux Pays-Bas. « Les volontaires britanniques ont traversé la Manche en grand nombre et ont été le fer de lance de la renaissance du continent. En Allemagne, en Autriche, en Belgique, en Grèce, en Hollande, en Italie, en Tchécoslovaquie des équipes du SCI ont nettoyé des décombres, construit des ponts, des digues, des hôpitaux, aménagé des terrains de sport et des homes d’enfants et aidé des coopératives de construction »4. En août 1946, 450 volontaires originaires de 12 pays ont ainsi participé à 25 chantiers situés dans 12 pays5. En 1947, de nouvelles branches ont été créées en Allemagne fédérale, Belgique et Norvège.

Etant donné l’ampleur du problème et le nombre de volontaires – particulièrement des jeunes – ce ne sont pas seulement les organisation expérimentées (comme les Quakers) qui se sont impliquées. De nouveaux mouvements ont proliféré, souvent avec la même orientation que le SCI, tandis qu’en Europe de l’Est la jeunesse était mobilisée en masse sur de très grands chantiers. «La principale caractéristique de l’histoire des chantiers au cours des quinze ans qui ont suivi la guerre a été l’adoption et l’adaptation du travail manuel volontaire par une pléthore d’organismes inspirés par différentes idéologies... Le SCI ne représentait plus, comme c’était le cas avant la guerre, le principal courant dans la multiplicité des organismes de chantiers inspirés par un idéal. C’était seulement un mouvement parmi d’autres qui avaient recours aux chantiers comme méthode de mise en œuvre de leur idéal. Pour accueillir les nombreux jeunes désireux de rendre un service social sans suivre une idéologie particulière, des organismes sans idéologie se sont créés. Le chantier n’était plus lié à une seule idéologie pacifiste ; c’est devenu une activité que n’importe quel mouvement pouvait organiser. Désormais, le chantier n’était plus un mouvement, c’était une méthode”6. Mais le SCI a conservé sa spécificité par un engagement plus ferme en faveur de la paix et de l’objection de conscience.

b) Jusqu’à la Deuxième Guerre mondiale, le SCI était resté un mouvement très informel. Son expansion exigeait nécessairement une structure et davantage d’organisation. En 1946, une réunion des différentes branches européennes décidait de mettre en place un Comité international avec un Président et un Secrétariat permanent. La même année se tenait la première rencontre des Secrétariats des branches européennes. Et en 1948, une réunion des délégués adoptait une constitution.

A la suite de la multiplication des organisations de chantiers, un Comité de Coordination des Chantiers de Travail Volontaire était créé en 1948 sous l’égide de l’Unesco. Le SCI a joué un rôle important à son démarrage.

Plusieurs souvenirs de volontaires figurant dans ce chapitre illustrent la vie et le rôle des animateurs qui ont contribué à l’organisation et au développement du SCI durant cette période. Ils ont d’abord été volontaires sur des chantiers, puis on leur a demandé de prendre des responsabilités permanentes, comme volontaires de longue durée ou avec une très modeste rémunération. Ils ont conservé un esprit de volontariat et ont souvent repris ultérieurement des activités volontaires.

c) D’après le Comité de coordination, la fin de la période de reconstruction a entraîné une reconversion radicale, du fait de la diminution soudaine des projets de travail manuel que l’on pouvait proposer aux volontaires.7. C’est l’un des facteurs qui ont contribué à la diversification des activités du SCI. Au cours de la période suivante, des chantiers de week-end ont été organisés, pour la rénovation de logements de personnes ayant un faible revenu, généralement âgées. Comme le montrent les mémoires, ces chantiers ont souvent représenté pour les volontaires une première occasion de connaître le SCI, son esprit et ses méthodes. L’aide d’urgence à la suite de catastrophes a été très tôt et est demeurée une activité importante, en particulier du SCI (Orléansville, 1954). La branche française avait créé une équipe d’action d’urgence, animée par Pierre Rasquier8.

La guerre froide a permis aux volontaires du SCI de mettre en pratique ses principes de compréhension entre les peuples pour contribuer à la paix. Dans l’immédiat après-guerre, les souvenirs de Dorothy Guiborat et de Nelly Forget évoquent la confrontation avec des jeunes de pays récemment tombés dans l’orbite communiste. Puis le SCI a joué un rôle de pionnier en organisant en collaboration avec des organismes locaux des chantiers Est-Ouest avec des participants venant des côtés du Rideau de fer. Dans ses souvenirs de chantier comme dans son ouvrage (One Million Volunteers) Arthur Gillette rappelle la suspicion qu’ont soulevée ces initiatives. Voir aussi les souvenirs de Max Hildesheim (chapitre 5).

Ce recueil de souvenirs est particulièrement centré sur une nouvelle forme d’action lancée au cours des années 60 : les échanges de volontaires dits Orient Occident, mais qui concernaient non seulement l’Asie, mais aussi l’Afrique. Dans beaucoup de cas, ils alternaient des chantiers traditionnels « pelle et pioche » et un travail social ou médical. Plus récemment, de nouvelles formes d’échange se sont développées avec le programme « femmes et développement » en Afrique (Voir Nicole Paraire, chapitre 5). Il y a eu aussi des chantiers avec des handicapés (Dorothy Guiborat, Jean-Pierre Petit).

d) L’internationalisation a progressé dés la fin de la guerre, avec l’arrivée en Europe continentale de volontaires du Royaume-Uni, mais bientôt aussi des Etats-Unis (Phyllis Sato, Arthur Gillette). Comme on l’a vu, de nouvelles branches se sont créées, d’abord en Europe, puis en Asie. Celle-ci et notamment l’Inde, ont joué un rôle de plus en plus important, comme le montre le chapitre suivant. Puis, comme on vient de le voir, des échanges ont aussi eu lieu avec l’Afrique, mais également avec l’Amérique latine (Nicole Paraire). On évoquera, au chapitre de conclusion, quelques-uns des problèmes suscités par ces développements.

Footnotes

  1. Arthur Gillette: One Million Volunteers. Penguin, 1968.
  2. The seventies for the Portuguese colonies.
  3. Hélène Monastier: Paix, pelle et pioche, histoire du Service civil international de 1919 à 1965 (Service civil international, 1965).
  4. See the story of Arthur Gillette in this chapter and of Phyllis Sato



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